[RP] Chant dans les rues de Bruges

Ce samedi matin, Lexah se leva tôt.
Aujourd’hui, elle avait prévu de donner une représentation artistique avec Héloïse. Après une petite soirée à comploter contre « l’autre-là » pour envoyer cailloux, parpaings et autres joyeusetés sur le toit de sa maison, les deux femmes en étaient venues à monter un groupe. Elles n’étaient d’accord que sur le « teubés », ne sachant s’il fallait rajouter « frits » ou non. L’idée d’appeler son « girls band » les « teubés frits » l’enchantait plus que simplement les « teubés ». Mais s’il fallait faire quelques concessions pour perdurer, elle était prêtre… Ouais, je sais, quelle grandeur d’âme, hein ?
Sur la place publique de Bruges, Lexah attendit sa collègue, la cherchant des yeux parmi les villageois qui passaient sans faire attention à elle.

[hrp]Lexah[/hrp]

Pardonnn, pardoooon, oui voilààà, merci de faire plaaace.
Pardon madaaaame, oh, désolée pour votre robe !
Monsieur, j’peux passeyyy ? Monsieur ohééé… Oh.. pardon… vous êtes une ma...dame… heuu je suis… attendue là…
Oui, voilà, merci…
Excusez-moi, mercii, voilàà, on se pouuussseee…Sans me toucheeer, c’est un tissu cheeer jeune homme !

Coups de coudes en tous genre, grimace mi-exaspérée mi-j’ai-envie-de-te-défoncer-la-gueule, Héloise parvient jusqu’à Lexah avec un sourire figé au coin des lèvres. C’est que, pour gagner le cœur de son public, suffisait pas de faire des belles chansons, fallait pas seulement avoir une belle voix et un p’tit peu d’idées non, fallait aussi être poli et cordial et ça, avec les pecnots parfois, la Comtesse avait du mal ! Mais, elle affiche tout de même un sourire, parce que d’abord elle va sans aucun doute passer un bon moment, puis en plus, sa tête fourmille d’idées. Accrochant le bras de la prêtresse curetonne qui n’en semblait pas une pour l’occasion, elle regarde son public l’œil brillant : que des boulets qui passaient en zieutant sur les deux donzelles qui, arrêtées en plein milieu de la place, se voyaient déjà avec des paillettes dans leur vie et les moulures au plafond.

Z’avez-vu tous ces gens ? J’ai chauffé ma voix toute la matinée !

Ah ? Fallait chauffer sa voix ?

Oui, en y repensant, ce n’était pas con. Peut-être que Lexah allait devenir aphone, ou que sa voix se casserait. La honte pour une première !
Non, il fallait partir du principe que tout se passerait bien et tout se passera bien. Mais pour être bien sûre, la petite brune fit quelques vocalises, s’attirant les regards des passants. Elle n’y fit pas attention, se préoccupant peu du jugement des autres. Le seul jugement qui importait était divin. Remarquez, avec toutes les conneries qu’elle faisait, elle était vouée à l’enfer plutôt qu’au paradis. Ne faisant rien pour trouver grâce aux yeux de Dieu, pouvait-on dire que son jugement était VRAIMENT important à ses yeux ? Vous avez quatre heures.
Après les vocalises, Lexah regarda Héloïse et prit un air très grave, murmurant : « Il est temps… » Temps de chanter, pas de massacrer la population. Lexah fit un pas en avant, entraînant sa partenaire de chant avec elle.

Brugeais, brugeaise ! Aujourd’hui, sous vos yeux ébahis, les teubés Frits.

Lexah ferma les yeux quelques secondes et prit une profonde inspiration avant d’ouvrir la bouche pour le premier couplet :

On s’présente, on est les teubés
On est là pour vous enchanter, enchanter-er
On est belles, on a toutes nos dents
Puis surtout on a du talent
Et pour tout ça, on devrait gagner plein d’argent.

TINTINTINTIN TINTIN TINTINTIN TINTIN

Clapant dans ses mains au rythme de la chanson de Lexah, elle encourage le bon peuple à faire de même - gros bide, gros vent, c'est le début hé, jugez pas-. D’après son avis faussement expert, la voix de la jeune prêtresse n’était pas assez puissante, fallait plus de coffre pour que les pecnots leur accordent un peu d’attention, les boulets ne réagissaient qu’au cri ou aux confrontations. Pour sûr elles se seraient battues à mains nues dans le sable qu’il y aurait eu une pluie d’écus sur leur tronche. Mais hé, leur groupe sonnait comme une mauvaise blague : une Comtesse une prêtresse sur la place publique qui chantent une chanson pour amuser les braves gens.... Alors hors de question qu'il y ait bagarre nan. Sauf si on leur balançait des immondices pour les faire taire.

A la suite de Lexah, et entraînée par toutes ces nuits avec son barbu à réveiller du local à grands coups de chansons en tapant sur des casseroles, elle entonne d’une voix un peu plus forte. Gagnée par la confiance du groupe qu’elles faisaient à deux, sans arrêter ses claquements de mains

Y a deux jours on chantait dans not’bain
On gueulait, emmerdant nos voisins, nos voisiiinnnnsss,
A présent nous voilà d’vant vous,
A écrire une chanson dans l’coup,
Alors chantez, reprenez donc après nouuuus

Tintintintintinnnnnn

Et partout dans les Flandres, on entendra nos voix,
Les clodos frapperont dans leurs mains tant de fois,
Qu’vous dormirez plus la nuiiiiiiit,
Assourdiiiiiiis étourdiiiiiiiiiis

Lexah frappa aussi dans ses mains, au même rythme que sa partenaire lyrique. Y a pas à dire, elle était quand même vachement douée. Elle la regretterait pour ses cérémonies : mariages, messes, enterrements, etc. Voilà qui aurait donné plus d'énergie à ses sermons religieux ! M'enfin, elle ferait sans elle...
Après le refrain, ce fut au tour de Lexah de reprendre. Et elle ne perdit pas de temps.[/i]

Et pour tous les brugeais, devenir des idoles
J'veux que toutes les semaines, on s'réunisse ici
Que ça chante que ça riiiiiie
Que jamais on ne nous oubliiiiiiie

Elle avait repris en coeur la suite du refrain avec Lexah, sourire aux lèvres alors que quelques badauds s'arrêtaient pour les écouter ! Y avait de quoi : deux voix quasi-mélodieuses, un air parfait qui allait rester des mois dans leur cabosse. Que demande le peuple? Filez les écus et tout le monde sera ra-vi ! Ce genre de machin, dans les Eglise, ça ferait fureur ! Le mioche qui passerait avec le petit panier pour les aumônes saurait même plus le porter à la fin. Vin alors le second couplet. En bombe, la Comtesse repris la chanson. Enfin, surtout en rythme hé !

Puis après, on f'ra la fiesta,
Le public, sera tout en joie,
Tout en joiiiiie,
Notre chanson dans la rue résonne,
Et même les clodos fredonnent
Ce p'tit air, qui rest'ra dans votre têêêête....

Et partout dans les Flandres, on entendra nos voix,
Les clodos frapperont dans leurs mains tant de fois,
Qu’vous dormirez plus la nuiiiiiiit,
Assourdiiiiiiis étourdiiiiiiiiiis

Et pour tous les brugeais, devenir des idoles
J'veux que toutes les semaines, on s'réunisse ici
Que ça chante que ça riiiiiie
Que jamais on ne nous oubliiiiiiie...

Les saltimbanques du monde,
Dirons qu'on est timbrées,
Que notre air est immonde,
Et qu'on doit s'arrêter,
On cramera leur sale trooogne,
En même temps qu'leurs giboooooles...

Alors on s'ra les seules à chanter comme des folles
Tous les Grands du Royaume s'arracheront nos violes,
On sera aduléééées,
Vénérées respectéééées....

A la fin de leur prestation, Lexah applaudit. Notez qu'elle applaudissait plus sa partenaire musicale qu'elle-même, hein ? C'était sûr et certain : elles allaient faire fureur dans le royaume !